Le livre que je suis en train de lire est « Preserving Minds, Saving Lives » (Préserver les esprits, Sauver les vies), édité par « Alcor Life Extension Foundation », leader du domaine de la cryopréservation.
Dans cet article je partage avec vous mes notes de lecture.
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L’Histoire de la cryonie
Le livre profite du chapitre sur l’histoire de la cryonie pour nous rappeler un phénomène récurrent de l’émergence de découvertes scientifiques et technologiques: la résistance à l’acceptation de la nouveauté.
En voici quelques exemples (pas nécessairement tirés du livre):
- La Terre tourne autour du Soleil – 1600s
On trouve des traces de cette vision héliocentrique de l’univers en des temps aussi reculés que la Grèce antique, mais ce n’est vraiment qu’à la renaissance que le système finit par s’imposer, avec les travaux précurseurs de Copernic puis Galilée. Les deux scientifiques ont dû faire face à la farouche résistance de l’église ayant qualifié les travaux de Galilée « d’hérétiques ». - La pasteurisation et la dissémination des maladies par les germes – 1850s
Louis Pasteur, scientifique français a dû se battre contre les tenants de la génération spontanée qui soutenaient que des organismes microscopiques apparaissaient spontanément au contact de l’air sans besoin d’une vie préexistante. Avec une telle conception point besoin de prendre les mesures nécessaires qui auraient empêché la dissémination des agents pathogènes. On imagine les ravages qu’ont dû subir jusqu’alors les patients de chirurgiens ne prenant pas la peine de désinfecter mains et instruments opératoires entre deux interventions! - La dérive des continents
La dérive des continents, qui est leurs mouvements progressifs l’un par rapport à l’autre, a été nommée ainsi par Alfred Wegener en 1912. Il n’est pas le premier à avoir proposé cette théorie, mais c’est à la suite de ses recherches que la théorie a pu évoluer pour finir par être définitivement acceptée. Cette acceptation a nécessité de nombreuses années à cause de la forte opposition rencontrée par la théorie. Un des problèmes soulevés par les objecteurs fut l’absence de force plausible à l’origine du mouvement des continents. - Les bactéries à l’origine des ulcères et cancers gastriques – 2005
Cet exemple est particulièrement intéressant car contemporain. Voici l’exemple moderne d’une fausse théorie contre laquelle a dû batailler un médecin pour faire triompher la vérité, ce qui permit de sauver de nombreuses vies.Barry J. Marshall est un médecin microbiologiste australien.
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Au début des années 80 il a émis l’hypothèse selon laquelle les cancers de l’estomac seraient dus à une bactérie particulière: Helicobacter pylori, et non au « stress » comme il était coutume de le penser alors. Petite digression: je serai curieux de savoir le nombre de pathologies actuellement attribuées au « stress » faute de mieux, dont on établira les causes réelles dans le futur.…Son hypothèse est moquée par la communauté médicale qui ne pense pas qu’une telle bactérie puisse survivre dans l’acidité de l’estomac. Ses premières recherches ne sont pas revues par ses pairs et il lui est interdit de faire des expériences sur des humains.
Il décide de faire une expérience sur le seul humain qu’il puisse éthiquement recruter: lui-même. Il ingère une solution contaminée par Helicobacter pylori et développe en quelques jours seulement tous les symptômes de l’ulcération sévère de l’estomac. Il procède à tous les examens nécessaires pour suivre l’infection, et finit par se soigner totalement… avec de simples antibiotiques. Combien de vies humaines auraient été sauvées si les recherches du docteur Marshall avaient été prises au sérieux plus précocement?
En 2005 Marshall et son collège furent honorés du prix Nobel de médecine « pour la découverte de la bactérie Helicobacter pylori et son rôle dans les problèmes gastriques et les ulcères de l’estomac »
La circonspection en matière de nouvelles théories scientifiques et médicales n’est pas une chose mauvaise entendons-nous bien. Le scepticisme permet d’éviter que n’importe qui puisse clamer n’importe quoi. Mais bien souvent, la résistance fait perdre un temps précieux surtout quand elle est davantage culturelle que scientifique.
En ce qui concerne la cryogénie, la résistance est double.
- Résistance scientifique et technologique, faute de preuve:
La cryonie considère que la plupart des corps défunts seront susceptibles de bénéficier d’une réanimation quand la technologie sera suffisamment développée pour le permettre. Mais elle ne peut prouver son postulat: s’il lui est possible de préserver les corps grâce à la vitrification, il lui est impossible de démontrer la faisabilité d’une réanimation. La communauté scientifique ayant tendance à rejeter tout ce qui ne peut être vérifié par l’expérimentation, son regard sur la cryonie est loin d’être exalté. - Résistance culturelle:
Pour tout un ensemble de raisons culturelles dont quelques-unes ont été citées dans le deuxième article de mes notes de lecture sur le livre, l’humanité n’est pas prête à accepter la perspective d’une extension de vie radicale. Cette perspective, est aujourd’hui précisément au point de passage obligatoire pour les idées les plus innovantes aussi bénéfiques soient-elles: le point du rejet et de la défiance.
C’est sur ce deuxième aspect, culturel, que se positionne Future Is Great.
Nous voulons changer la vision prévalante négative du futur; faire accepter l’idée qu’une extension radicale de vie puisse être 1) Souhaitable 2) Possible. Ce qui aurait pour effet vertueux par l’enthousiasme suscité d’accélérer les recherches en ce sens.
Dates et personnages historiques de la cryonie
- 1766, John Hunter, chirurgien et physiologiste de renom
C’est durant l’âge des lumières que ce scientifique émit l’hypothèse de l’utilisation de la congélation pour prolonger la vie indéfiniment. Il imagina qu’il puisse être possible de congeler un humain pour 1000 ans pour le réanimer périodiquement tous les 100 ans afin de lui apprendre ce qu’il advint durant son sommeil glacé. Il alla jusqu’à conduire des expériences sur des poissons, mais se découragea devant les résultats peu probants. Il fut le premier à planter le décor du cycle congélation / préservation / réanimation. - 1931, Neil R. Jones, auteur de la fiction « The Jameson satellite »
En lisant le résumé qu’écrit R. Michael R. Perry, Ph.D. à propos de la fiction « The Jameson satellite » j’ai tout de suite eu envie de me précipiter sur Amazon me commander le livre. L’histoire raconte les aventures du professeur Jameson qui parvint à faire envoyer son corps mort dans l’espace afin qu’il soit préservé pour l’éternité. Jameson n’a jamais eu l’intention de revenir à la vie, mais les millions d’années passant, des extra-terrestres vont trouver sa dépouille en orbite et la réanimer. Jameson sera doté d’un nouveau corps de métal et découvre que la race humaine s’est éteinte depuis bien longtemps. Il doit alors affronter une crise existentielle face au vide de son existence, ayant perdu tout repair. Une vie éternelle coupée de de ses racines lui apparait insurmontable, et il hésite entre se donner la mort ou quitter l’ancien monde pour se lancer dans une nouvelle vie avec ses nouveaux compagnons extra-terrestres. Il finira par choisir de se donner la mort avant d’être convaincu in extremis par les mots bienveillants des extra-terrestres, de finalement choisir la vie.
Cette histoire, touchante, est une excellente métaphore d’une problématique à laquelle sont intellectuellement confrontés les cryonistes: sera-t-il possible de redémarrer une vie de zéro, dans un nouveau monde futur si différent de l’ancien? L’auteur Neil R. Jones illustre le dilemme et choisit l’optimisme. Le héros fait un bon en avant et décide d’embrasser pleinement le nouveau monde.Un palliatif de la dépression post-réanimation pourrait être de se faire cryopréserver avec ses proches. Revenir à la vie dans 300 ans avec ma famille? Je prends tout de suite!
L’expérience actuelle de la perte d’un ainé emporté par l’âge et la maladie, ne serait-elle pas bien moins douloureuse avec l’espoir que la séparation soit temporaire plutôt que définitive? Ne serait-il pas réconfortant de se recueillir devant une cuve cryogénique plutôt qu’un cercueil contenant le cadavre pourrissant d’un proche à jamais décomposé?
- 1962: Publication privée de « Immortality: Physically, Scientifically, Now » par Evan cooper
- 1964: Fondation de la Life extension foundation par Evan cooper
Even cooper fut le premier à tenter d’organiser le mouvement cryoniste (ce terme n’était alors pas encore employé). Il ne parvint pas à pérenniser son mouvement, mais son rôle fut determinant dans la suite des événements. - 1964: Robert Ettinger influencé par sa lecture du livre « The Jameson satellite » publie la version commerciale de son livre « The prospect of immortality ». Il est commun de considérer ce livre influent comme le point de départ du mouvement cryoniste et Ettinger comme le père de la cryogénie. Il est nécessaire cependant de souligner l’importance de ses précurseurs et contemporains. Ettinger fonda le « Cryoniste Institute » en 1976, et mourut à l’âge de 92 ans. Il est actuellement en état de cryopréservation maintenu par l’institut qu’il fonda.Imaginez l’importance historique d’un tel homme, si la cryogénie devait aboutir et qu’il soit l’un des premiers patients ramenés à la vie!
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